FRANÇOIS ROSTOLLAND

PRESIDENT D'HONNEUR DE L'ABT

(par Catherine Hounau)

Il voue sa vie aux chiens et à leurs conducteurs, parcours et portrait d'un homme fait  chevalier de la légion d'honneur pour  l'ensemble de ses activités cynophiles


Difficile de résumer la vie cynophile de François Rostolland en quelques lignes. Il a presque fallu trois cents pages à Georges Fleury pour raconter la vie de ce rude montagnard du Briançonnais et celles de ses nombreux chiens dans un livre*(1) paru en 1991.

Difficile aussi de savoir par quel bout commencer tant la vie cynophile  de François Rostolland est riche, dense et multiple. Du sport canin aux disciplines utilitaires, il a tout fait ou presque.

Je crois cependant qu'il aura marqué de  son empreinte l'histoire de la cynophilie en tant que  directeur et créateur de l'école nationale du chien de recherche et de sauvetage en décombres installée à Briançon. Briançon, SA ville dont il vous dira et vous redira qu'elle bénéficie de trois cents jours de soleil par an. Et, si vous passez huit jours sous la flotte c'est que vous n'avez vraiment pas de chance. C'est ce qu'il racontait à la cinquantaine de stagiaires qui chaque année défilaient à Briançon pour tenter  d'obtenir avec leur chien le brevet de décombres.

E.T LE PIT BULL,

CACHOU LE BRIARD

Depuis quelques années, les pompiers, majoritaires dans cette activité cynophile, ont crée leur propre centre. Mais celui de Briançon existe toujours pour les civils ou ceux rassemblés dans le COSI (comité d'organisation des secours internationaux).  L'Iran, le Mexique, l'Inde, l'Arménie, François Rostolland est intervenu de nombreuses fois à l'étranger. Mondialement connu, la réputation des chiens de décombre français issus de l'école de  Briançon a valu à François et quelques conseillers techniques du centre d'encadrer régulièrement des stages à l'étranger.

 Si François est en quelque sorte le père des chiens de catastrophe,  il a aussi pratiqué et pratique toujours la plupart des disciplines utilitaires : avalanche, drogue, explosif, recherche de personnes disparues, il est de tous les combats où la vie humaine  est en jeu sans chercher la gloire. Car  modeste, ce qui compte pour François  c'est l'efficacité de ses chiens quand il y a urgence, quand il y a péril.

Profondément investi dans les disciplines utilitaires, il n'en a pas pour autant négligé les disciplines sportives pratiquant le ring  et le RCI en échelon III. Ceux qui font du RCI en ont sans doute entendu parler puisqu'il a été finaliste des championnats de France  en 1991 avec un chien étonnant et détonant : Volvic du Grand Bestiolan un Berger des Pyrénées que l'on  regardait en riant suspendu dans la manchette  et  qui se battait comme un lion avec l'homme d'attaque. Volvic, dit Vic était également un vaillant petit chien de décombres.

Si François Rostolland a eu de nombreux Bergers allemands et Bergers Belges, il n'a jamais rejeté une race parce qu'un bon chien est un bon chien telle Colombia sa gracieuse Doberman, chien d'explosif que les américains avaient invité chez eux pour une démonstration à Miami. Il y a eu aussi E.T, le Pit Bull ramené du Mexique et breveté chien de décombres. C'était il y a longtemps, bien avant qu'on ne les classe en chien de première catégorie. Une loi dont François Rostolland a  été le premier à combattre l'ineptie.

Parmi ses nombreux chiens, François a eu un beau Briard noir, récupéré à l'âge adulte,  François devait au départ lui trouver une famille d'accueil. Mais Cachou n'était pas que beau, il était aussi bon avec ce "jus" qu'aime tant François… alors il l'a gardé. Breveté décombres et ring, Cachou aurait sans doute pu évoluer dans les échelons supérieurs si François à l'époque avait disposé d'un homme d'attaque aussi dévoué que lui quand  on venait le trouver pour faire travailler son chien.

En 1986, François Rostolland a été  élevé au grade de chevalier dans l'ordre national de la Légion d'honneur. A l'époque le préfet qui avait fait son éloge avait comptabilisé 160 opérations de secours en montagne et de recherches cynophiles. La Légion d'honneur, il ne vous en parlera pas, inutile de chercher la rosette au revers de son tee shirt Royal Canin ou à l'effigie d'une autre marque de croquettes. 

"LE MAILLON D'UNE CHAINE, L'ELEMENT D'UN COUPLE"

A 68 ans, ce CRS en retraite cavale comme un lapin sur le décombre et enfile la manchette avec cette curiosité insatiable de découvrir le chien dans son mordant. Toujours sur la brèche, toujours à entraîner à droite à gauche, souvent invité à l'étranger voici dix ans que j'entends François Rostolland se lamenter qu'il n'a pas le temps de retaper sa maison de Névache, son village natal. Il a bien l'intention d'envoyer un mot  à Corinne. Ne soyons pas trop pressé. J'aurais aimé mettre au point avec lui quelques détails de sa biographie. Mais la seule fois où j'ai réussi à le coincer au téléphone… Il devait repartir.  Bref, vous aurez plus de chance de trouver François sur son terrain de décombre que de l'avoir au bout du fil.

Les aventures canines de François Rostolland se sont doublées de nombreuses aventures humaines, jalonnées de solides amitiés, de quelques déceptions aussi, lorsqu'à l'heure des choix l'esprit de corps a pris le pas sur la cynophilie. Mais jamais je n'ai entendu la moindre critique sur François Rostolland, toujours évoqué avec respect et souvent avec gratitude.

Lui même reconnaît qu'il a un sale caractère. Mais après tout personne n'est parfait, même lui. L'engueulade passée il est le premier embarrassé mais il ne le dira pas. Pour faire oublier sa colère, ll y a toutes les chances qu'il vous invite à manger chez lui ou qu'il vous tende un os énorme pour votre pote à quatre pattes.

Si François avait été chien, sans doute aurait-il été un chef de meute au caractère bien affirmé. Mais s'il lui arrive de gronder, jamais il ne mord.  Sa patience, toute sa patience,  il la réserve aux chiens. Du plus limité au plus brillant, tous ont droit à son respect et aux mêmes égards. Georges Fleury évoquant son voyage à Miami pour la démonstration de Colombia et de Vic raconte l'étonnement des américains devant la relation qu'il a su tisser avec les chiens et cite la réponse de François "Pour moi, avant et après le travail ils sont de vrais amis…Et pendant le travail, le maillon d'une chaîne, l'élément d'un couple… C'est aussi simple que ça! C'est pour cela que je ne parle jamais de dressage mais d'éducation"

 *(1) Pirrhus, Lesko et les autres par Georges Fleury éditions Grasset (voir également vos Chiens de mai 2002)